vendredi 4 avril 2014

Des pompiers en pagaille


Bon, soyons francs, le thème des pompiers dans le livre pour enfant n'est pas des plus originaux, il a déjà été traité mille et une fois, et souvent en véhiculant les pires clichés.C'est pour ça qu'on est contents de vous parler de deux albums atypiques qui raviront les lecteurs amateurs de casques, de lances et de sensations fortes.

Adrien Albert nous offre  "Au feu petit Pierre", un album détonnant tant par sa narration que par ses couleurs complètement psychédéliques. Ce n'est pas un coup d'essai pour ce jeune auteur, dont on avait déjà remarqué les excellents "Cousa" et "Simon sur les rails". L'Ecole des Loisirs semble avoir trouvé en Adrien Albert une relève, un digne héritier des Tomi Ungerer, Philippe Corentin, Catharina Valckx, Anaïs Vaugelade et autres, tous ses auteurs qui ont fait de cet éditeur un pionnier dans la narration de l'album illustré. Adrien Albert tient pour l'instant ses promesses, en créant des histoires originales, et qui ont un pouvoir vraiment captif sur les petits.


"Au feu petit Pierre" est un véritable album d'aventures, au sens premier du terme. Petit Pierre, est petit comme son nom l'indique, mais ça ne l'empêche pas d'être pompier. Il est accompagné dans sa tâche par un jars et un orang-outan. Adrien Albert fait fi de la vraisemblance, et pourtant on y croit à chaque instant. Cette nuit-là, l'alerte est donnée (par la mère de Petit Pierre, qui joue à la standardiste) et nos vaillants compagnons partent affronter la ville en feu. Les illustrations de la ville en flamme sont impressionnantes,  il y a la double page où l'on voit les immeubles dévorés par le feu et sur la gauche de l'image, on aperçoit Pierre qui à l'air minuscule face à l'ampleur de l'incendie. Mais ça ne l'empêchera pas de porter secours à la population. Adrien Albert est le champion du découpage en séquences, il alterne des images pleine page, avec des pages découpées en 4 ou en 2 longues bandes verticales. Cette technique donne vraiment un rythme et une temporalité à l'action, parce que le texte est finalement assez simple et souvent descriptif. Pierre fait preuve d'un courage sans pareil, mais il n'est pas au bout de ses peines, car il lui reste sa mamie à sauver. Et quelle mamie, loin de l'image des vieilles dames au chignon gris qu'on a l'habitude de voir dans les livres pour enfants, la mamie de Pierre  a les cheveux rouges et un look digne d'une rock star. Tout se termine bien, Petit Pierre a sauvé la ville, sa mamie y compris. Voilà bien une histoire de pompiers atypique qui fait preuve d'énormément de fantaisie, de celle qui font rire les enfants de bon cœur!


Tout droit sorti des années 30, "le petit pompier" de Margaret Wise Brown et Esphyr Slobodkina est un petit bijou ressorti du placard par les éditions Didier. Cet album s'inscrit dans la collection Cligne Cligne, qui remet à l'honneur des merveilles de la littérature jeunesse inconnues du public francophone. On y avait déjà épinglé  les albums d'Ezra Jack Keats ("Un garçon sachant siffler" et "La chaise de peter") qui mettait en scène des petits héros de couleurs, ce qui se fait toujours extrêmement rare dans l'édition jeunesse aujourd'hui.

Mais revenons à nos pompiers qui prennent vie sous la plume de Margaret Wise Brown ("Bonsoir Lune", "La petite île", etc..). Cette histoire parue pour la première fois en 1938, met en parallèle les actions d'un grand pompier ("vraiment très grand") et d'un petit pompier ("vraiment très petit"). Les images d' Esphyr Slobodkina, une peintre abstraite d'origine russe sont réalisées en papiers découpés. La mise en page est tout à fait admirable et tellement avant-gardiste. Au contraire de celle d'Adrien Albert qui relègue systématiquement le texte sous les images comme les sous-titres d'un film (ça donne un peu l'impression d'un arrêt sur image), la mise en page de la russe mêle le texte aux dessins. Le texte est partie intégrante de la composition, il fait même sens, puisqu'elle varie la taille de la typo en fonction du propos. Les lettres deviennent plus petites lorsqu'elle évoque le petit pompier. C'est d'ailleurs ce thème du grand et du petit qui est au centre de l'album, plus que celui des pompiers, qui n'est qu'un prétexte. Mais grand et petit ne sont pas évoqués dans un rapport de force, petit et grand pompier sont sur un pied d'égalité, malgré leur différence de taille. Comme dans le livre d'Adrien Albert, le texte se veut simple, sans fioritures, mais efficace et agréable à lire à haute voix. Une belle pépite à (re)découvrir!









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